Intro : Candide est un conte philosophique écrit par Voltaire en 1759. Voltaire est un philosophe des lumières très célèbre du XVIIIe siècle, il est resté très célèbre pour ses œuvres qui comprennent des contes philosophiques comme Zadig et Candide de nombreuses lettres, des pièces de théâtre etc.. Il y dénonce, dans ce conte, l'arbitraire de ce monde ainsi que la philosophie optimiste de Leibniz qui consiste à faire croire que tout est "pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles". Le héros Candide ainsi que les autres protagonistes du livre subiront de multiples aventures extraordinaires qui les conduiront vers une fin moraliste. Dans ce passage on s’interroge sur le fait de savoir comment Voltaire s'emploie à dénoncer l'arbitraire de l'Inquisition.
Aussi, nous étudierons en quoi ce passage est une mise en scène carnavalesque puis comment Voltaire fait un argumentaire contre l'absurdité de l'inquisition et enfin comment il emploie l'humour noir et l'ironie.
1 - Une mise en scène carnavalesque
– Un récit dense et rapide donné par:
- Juxtaposition de quatre actions. :
- La prise de décision de l'autodafé
- La désignation des coupables
- la procession religieuse
- L'exécution des coupables
- Ellipse narrative
Les éléments sont seulement juxtaposés. Voltaire fait une ellipse (un raccourci) narrative de huit jours pour concentrer le récit.
- Le texte s'ouvre et se termine sur le même point : la terre tremble : l’action n’a pas avancé, donc la cérémonie est inutile
– La cérémonie religieuse ridicule
Il s'agit d'une sorte de spectacle de parade de carnaval. cf les habits : "Mitres de papier, San Benito," les motifs des habits : "les flammes renversées, les diables qui n'ont ni queue ni griffes" (on peut rapprocher cette expression de celle de ni queue ni tête qui signifie dans le langage populaire quelque chose dépourvu de sens)
– la beauté de la procession : cf « procession » « sermon » « belle musique en faux bourdon »; il insiste plus sur la beauté du spectacle que sur son fondement moral ou scientifique (Ce qui est normal puisse que c'est cette cérémonie est basée sur l'absurde et non sur un fondement scientifique)
– Divertir le peuple : « donner au peuple un bel autodafé ». C'est expression est à rapprocher de l'expression latine "donner du pain et des jeux". L'idée dans l'Antiquité comme ici est de détourner l'attention du peuple de l'impuissance des gouvernants.
2 - Un argumentaire contre l'absurdité de l'Inquisition
– Dénonciation de l'arbitraire de l'Inquisition : Voltaire philosophe des lumières cherche à dénoncer l'arbitraire religieux. Ici il démontre celui-ci en s'appuyant sur des éléments qu'il montre comme complètement irrationnels ex : il n'y a aucun rapport entre le tremblement de terre et le fait de faire un autodafé. La terre tremble eu début et à la fin du texte soulignant que l'inutilité de cet autodafé
On comprend d'emblée que l'autodafé ne servira à rien ce qui discrédite cette action basée sur la superstition
– Une décision absurde : Les dirigeants sont qualifiés ironiquement de « sages » ils appartiennent également à l'élite intellectuelle car ils font partie de "l'université » or leur décision apparaît comme absurde et basée sur la croyance et non pas sur la réalité scientifique. Cela montre bien qu'ils sont incapables voire sectaires, c'est-à-dire totalement opposés à l'esprit de la philosophie des lumières qui lui est basé sur la connaissance et non sur la superstition.
–« On avait en conséquence saisi un biscaïen » le connecteur logique "en conséquence " qui doit normalement induire un fait logique, s'avère totalement absurde ici. Cette phrase est donc entièrement illogique ce qui montre bien ce que Voltaire veut dénoncer c'est-à-dire cette logique absurde et arbitraire.
– Quelles sont les raisons qui poussent l'inquisition à arrêter les condamnés ?
- Le biscaïen a épousé sa commère : cela signifie qu'il a épousé la marraine de l'enfant dont il est le parrain. Cela est interdit par l'église à l'époque.
- Les Portugais ont arraché le lard qui était autour du poulet. Cela signifie qu'ils ne mangent pas de porc et donc que ce sont sans doute des juifs qui se sont convertis après la Reconquista. L'Inquisition faisait la chasse aux juifs qui se cachaient
- Candide et Pangloss sont arrêtés pour des motifs irrationnels et imbéciles : l'un a parlé et l'autre à écouté
L'enchaînement des raisons qui poussent l' Inquisition à arrêter les condamnés connait donc une gradation sur un mode de plus en plus stupide et irrationnel. Voltaire invite donc le lecteur à s'interroger sur ce type de décisions et sur les raisons qui les motivent à fin de lui montrer à quel point l'arbitraire peut-être poussé loin
3 - L’emploi de l'humour noir et de l'ironie
– L'humour noir : Voltaire emploie l'humour noir avec efficacité. Il décrit une situation horrible avec un grand détachement. Par exemple il décrit le spectacle de l'autodafé comme une recette de cuisine« Quelques personnes brûlées à petit feu", ou la prison comme un endroit présentant un avantage celui de ne pas être "incommodé par le soleil"
– L'ironie : Voltaire dans l'ensemble du conte philosophique utilise énormément l'ironie. Elle consiste pour lui à écrire l'inverse de ce qu'il pense réellement. Il fait semblant d'être d'accord avec les situations qu'il décrit pour mieux les dénoncer. Il s'agit en réalité d'un faux éloge ou d'un éloge paradoxal :
- cf. : lorsqu'il utilise des termes mélioratifs comme « les sages » « efficace » « bel » il feint d'être d'accord avec ce spectacle tout en rendant son lecteur complice car celui-ci comprend bien le sens contraire des faits qui sont énoncés.
- cf. : antiphrases : "n’avait pas trouvé moyen plus efficace" ou "secret infaillible pour empêcher la terre de trembler"
- De même Voltaire se moque de la prison qu'il ne nomme pas directement mais qu'il désigne sous l’expression ironique « des appartements d'une extrême fraîcheur»
- Oxymore : "à petit feu, en grande cérémonie" qui par effet de contraste entre un terme culinaire trivial et le grandiose de la pompe met en lumière l’absurdité de la situation
Conclusion
Voltaire au travers d'une mise en scène pompeuse et ridicule, d'une argumentation étayée et d'une ironie mordante s’engage dans une dénonciation forte de l’arbitraire de l'Inquisition. Ce texte peut être rapproché d'autres textes des philosophes des lumières comme ceux de Montesquieu, Diderot ou Rousseau qui ont dénoncé différentes formes d'arbitraire comme celui de l’esclavage ou encore celui de l'absolutisme du pouvoir ou le sectarisme religieux.
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